Un Eurélien dans l’expédition de Lapérouse !
Simon Pierre Lavo est né le 17 février 1755 dans une famille aisée et cultivée de Germignonville, petit village de Beauce situé entre Chartres et Orléans. Il est le fils de Jacques Lavo, laboureur et marchand, et de Marie-Catherine Gidoin. Leur mariage célébré en décembre 1743, les Lavo tiennent une boutique prospère de vente de tissus divers ainsi que de livres de prière et d’histoire.
Ils n’hésitent pas à investir pour leur fils Simon dans un apprentissage auprès d’un chirurgien chartrain. Une fois formé, le fils Lavo débute la pratique de son métier à Germignonville, probablement à partir de 1772.
En 1777, Simon Lavo est « appelé » comme chirurgien-major de la Marine et « levé » pour les expéditions militaires selon les besoins des escadres. Il demeure à Germignonville jusqu’en 1778. Ses séjours se font plus rares à partir de 1799 car il vogue alors vers de nouveaux et plus lointains horizons…
D’abord accaparé par sa fonction de chirurgien-major de la marine durant la guerre d’indépendance américaine, il est capturé par les Anglais puis requis pour la campagne des Indes sous les ordres de Suffren. Ces campagnes pendant lesquelles sévissent des épidémies font de Simon Lavo un chirurgien aguerri et expérimenté. Probablement en fin d’année 1783, il regagne Germignonville où il est accueilli en héros par les villageois.
Le bailli de Suffren en grand uniforme Portrait du comte Jean-François de Galaup
d’officier général de la Marine de La Pérouse (Geneviève Brossard de Beaulieu,
(peint par Pompeo Batoni) 1778, Musée des Beaux-Arts de San Francisco)
Puis, en 1785, il est retenu pour participer à une grande expédition scientifique dirigée par Lapérouse, trois années durant. Il se voit promettre une pension s’il parvient à maintenir le nombre de morts en dessous de trois par an, durant l’expédition. Il fait partie de l’équipage de l’Astrolabe, sous le commandement de Fleuriot de Langle. Le chirurgien beauceron fait ainsi partie des tout premiers européens à reconnaître les côtes de l’Amérique du Nord, du Japon et de la Tartarie. Durant l’expédition, Simon Lavo doit maintenir l’équipage en bonne santé notamment en prévenant et soignant le redoutable scorbut.
Voyage de la Pérouse (carte : Alain Denizet)
Homme du siècle des Lumières, Simon Lavo possède de multiples talents notamment dans la maîtrise des langues étrangères. Ainsi, il compose un lexique fort utile à Lapérouse pour établir le contact avec les habitants des îles Kouriles.
Aux îles Kouriles, Simon Lavo (au centre, tourné vers la droite) s'emploie à composer
le vocabulaire des autochtones sous le regard de Lapérouse et de Langle
(Lavis de Duché de Vancy, portraitiste de l'expédition - SHAM, Ms SH 352. DR)
L’expédition de Lapérouse n’est cependant pas sans danger ; lors d’une escale en Alaska il repousse une attaque d’Indiens, lors de celle de Maouna, il est blessé et échappe à la nage à une attaque de « naturels »... Le chirurgien doit subir une trépanation.
L’expédition de Lapérouse sera sans retour. Le 10 mars 1788, après deux ans et demi de navigation, les deux frégates, parvenues dans l’archipel des îles Salomon en Océanie finissent par se fracasser sur les récifs de Vanikoro, île du Pacifique marquée par de très abondantes précipitations et dont les habitants passent pour être cannibales. Il y eut à priori des survivants dont peut-être Simon Lavo ; d’après un récit édité à New York en 1844, il aurait abordé les îles Vitu, au nord de la Nouvelle-Guinée-Papouasie et s’y serait installé puisque l’auteur affirme y avoir rencontré, en 1834, sa fille et son fils. Si cette source est fiable, le natif de Germignonville serait ainsi le seul rescapé connu de l’expédition Lapérouse ! Cependant, le tribunal de Chartres établit son décès le 24 floréal an X (14 mai 1802)...
Le naufrage de l’Astrolabe et de la Boussole au large de Vanikoro en plein Pacifique.
Dessin de Louis Le Breton (1818-1866) réalisé après la découverte du naufrage en 1827. DR
Pour aller plus loin sur le sujet, vous pouvez consulter au 2e étage de la médiathèque les ouvrages suivants :
- Bulletin de la Société Archéologique d'Eure-et-Loir. No 84, du Avril-Mai-Juin 2005 (P 301)
- Cahiers de la Société Archéologique d'Eure-et-Loir. No 1, du Année 2015 (P 301)
- Navigateurs d'Eure-et-Loir, dans les grandes expéditions des XVIIIe et XIXe siècles : de la Boussole et de l'Astrolabe à la Méduse : de l'expédition de Lapérouse, 1785, à la mission au Sénégal, 1816 / Juliette Clément, Alain Denizet, Jean Guillou, Eugène Lecoeur et al... - Chartres : Société Archéologique D'Eure-et-Loir, 2006. (910.9 NAV L)
Et le site alaindenizet.fr